Nu féminin de Trojan story |
Maman m'a souvent mis son sexe en plein
visage. Je n'ai aucun tabou, je parle beaucoup du sexe de maman. Mais
à force de le dire, le redire, le mot sexe finit dans ma
bouche aussi inoffensif et fade que le mot table ou le mot
chien.
J'ai pensé chien,
ce
n'est pas par hasard. Je dis aussi parfois, ma mère est une
chienne. Cela ne choque personne, mes amis ont l'habitude, cela les
amuse. Ils ont une propension assez banale, à rire dès qu'on parle
de cul... Dans les soirées, je fais encore mon petit effet, même si
au fil du temps, cela marche de moins en moins : le vulgaire
devient lassant à force, et si on réfléchit bien, je ne dis rien
de drôle.
Car lorsque j'évoque mon visage entre
les lèvres de ma mère, ce n'est pas pour faire de l'esprit,
pas non plus par goût de la provocation. Je suis dans ces moments-là
absolument, totalement sincère.
Aussi loin que je me souvienne, le sexe
de maman a toujours occupé ma vie.
Lorsque j'étais petite, nous allions
manger chez mes tantes le dimanche. C'était la belle époque pour ma
mère, ça buvait sec, ça fumait tout autant. Entre le café et le
digeo, maman racontait immanquablement à ses sœurs captivées,
comment ma grosse tête oblongue avait déchiré son con. Elle disait
ça en me couvant d'un regard plein d'amour, le genre de regard
glaireux qui poisse et vous cloue. Je restais silencieuse. J'écoutais
pour la énième fois le long passage, revivais le glissement
interminable dans son vagin. Les tantes s'enivraient de paroles,
elles n'avaient pas d'enfant.
J'imaginais leur bassin tout sec
s'agiter la nuit, je les imaginais se remémorer, filet de salive sur
oreiller mou, les lèvres rouges de maman se déformant sous
l'articulation du mot sexe. Le mot. J'aimais le répéter, le
tordre. Ma mère m'a donné ça aussi. Avec l'obsession de son corps,
le jouir des mots. Mon enfance a été bercée du récit maintes fois
réinventé de l'expulsion de mon corps hors de son ventre, de la
dilatation jusqu'au point de rupture de ses pauvres huit centimètres
de chair sous mes cinquante vagissant et rougeauds.
Puis j'ai grandi. Je n'allais plus
déjeuner le dimanche. Je n'avais plus envie de récit, la réalité
était nettement plus singulière. La réalité ressemblait à un
morceau de viande crue attendrie par les coups. Après son divorce,
ma mère a eu beaucoup d'amants.
Elle jouissait bruyamment, quel que
soit le type, quel que soient les corps. Pendant l'amour, certains
geignaient, d'autres grondaient, moi j'entendais toujours plus fort
derrière le mur ses « DÉFONCE MOI LA CHATTE ! »
« Défonce
moi la chatte ». Nous en avions une à l'époque. Une
chatte blanche à poils longs. Nous l'avions appelé Crevure. Je ne
me rappelle plus qui de maman ou moi avait choisi ce nom. Cela me
faisait rire tout bas le soir, son cri d'amour qui devenait un appel
au meurtre. Je caressais Crevure, serrais mes doigts contre son cou.
Parfois au lendemain de soirées
particulièrement torrides, maman m'appelait au réveil. Elle était
ces matins-là d'humeur tendre. Elle voulait un câlin, elle
minaudait, elle essayait de me retenir tout contre elle dans le lit.
Je sentais à travers le drap son corps collant. Cela me révulsait.
Je disais « Maman, je n'ai plus cinq ans ». Elle riait,
répétait que j'étais ce qu'elle avait de plus précieux au monde,
qu'aucun homme jamais ne prendrait ma place, qu'aucun homme jamais ne
la connaîtrait aussi bien que moi... Sûr qu'aucun homme n'était
allé aussi loin dans son sexe que moi, ça oui je le savais. Devant
mon air renfrogné, elle me demandait si je l'aimais. Je ne répondais
pas. Pas parce que je ne l'aimais pas, mais à cause de l'odeur. Je
retenais mon souffle, serrais les dents, cela sentait le foutre.
Imaginer son sexe. L'entendre
prononcer ce mot. Le dire moi-même. Tout cela ne me faisait plus
rien, qu'avais-je à craindre de deux syllabes ? Mais voir ou
sentir son sexe, c'était autre chose. Passer devant la salle de
bain, dont elle ne fermait jamais la porte, et la surprendre rasoir
en main, dénuder son pubis, voilà qui soulevait le cœur. À
chaque fois que cela se produisait évidemment, je claquais la porte.
Elle la rouvrait aussi sec, plantait droit ses yeux dans mes yeux et
me disait d'une voix sèche, que nous étions l'une à l'autre, que
je n'avais pas être gênée, parce que son sexe je le connaissais
bien, je m'y étais blottie, je l'avais malmené, qu'un jour ou
l'autre, moi aussi on me fourragerait... Puis soudain elle rejetait
la tête en arrière, le poids sur nos poitrines se relâchait, elle
se mettait à rire. « Que tu es drôle avec ta mine défaite ».
À mes dépens ou pas, j'ai expérimenté
le sexe comme une vaste plaisanterie. Ma mère m'a appris cela
: rire, jouir, faire semblant. Ne pas pleurer. Il s'agit à mon
tour de répéter les mêmes gestes, d'asséner les mêmes mots. La
regarder vieillir. C'est moi qui aujourd'hui harassée, la rejoins au
petit matin dans son lit. Je découvre sa nouvelle odeur, son corps
fermé et affaibli. J'appuie
fortement
ma bouche maquillée contre
les
mèches
blanches
sur sa joue.
Il n'y a rien d'autre à dire
que maman en
baisant
ses lèvres ridées.
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